Downwell : la perle du JV indépendant japonais

Le scénario et le gameplay de Downwell tiennent littéralement dans le titre : descendre dans le puits. Et au fond du trou, croyez-moi, vous allez y aller… En tout cas moralement. Vous pouvez abandonner honneur et fierté. Préparez aussi de quoi passer vos nerfs sans briser un écran au passage. C’est typiquement le genre de jeu qui a le don pour provoquer des cris rageurs chez tout individu normalement constitué. Vous allez mourir. Souvent. Et ça sera toujours de votre faute. OK, et un peu celle de son créateur sans pitié, que nous avons interviewé au passage.

Downwell 2

Version PC : les charges de votre arme sont indiquées sur le côté (comme sur iPad)

Devolver Digital (Hotline Miami, The Talos Principle, Broforce…) a réussit un coup de maitre en signant Ojiro Fumoto. Ce jeune étudiant japonais était encore à l’université quand il a diffusé sur le Net les prémices de ce qui deviendra plus tard Downwell. Quelques mois plus tard, il est le premier développeur de l’archipel à sortir un jeu avec l’appui de cet éditeur, spécialiste des pépites indés. Un coup de boost non négligeable pour la visibilité de son bébé, qui impressionne. Pour un premier jeu, réalisé en grande partie totalement en solo, c’est tout simplement bluffant. Sans parler du bonheur de voir un titre de cette qualité débarquer sans une once de micropaiement à l’horizon !

L’addiction à moins de 3 euros

Avec leur ambiance Gameboy, les captures d’écran de Downwell ne feront pas rêver le gamer accroc à l’Unreal Engine. Mais une fois animé, c’est une autre histoire ! Le gameplay, réglé au pixel, fonctionne parce que l’animation est d’une fluidité et d’une précision redoutable. Le jeu est simplissime : vous dirigez un personnage qui a décidé de rafler tous les diamants d’un puits très bizarre. Ce dernier semble sans fond, habité par des bestioles qui détestent être dérangées et la seule arme de notre aventurier n’est pas sans défauts. Ses gunboots (bottes-flingues) ne se rechargent que lorsqu’il se pose et ont la fâcheuse tendance à le faire remonter. Une caractéristique aussi pratique que potentiellement mortelle. Certes, on peut tenter de récupérer in extremis un passage vers un magasin ou une caverne (synonyme de bonus ou de diamants à la pelle), mais aussi aller jeter son crâne sous les canines d’une chauve-souris qui vous poursuit depuis que vous avez explosé le roc qui lui servait de maison.

Downwell 1

Le laser, aussi efficace que pénible à cause du faible nombre de charges.

Des MAGASINS ?

Ne faites pas cette tête, c’est un puits sans fond avec des magasins, je ne vois pas où est le problème ! Plus sérieusement, inspiré par tout un tas de titres qui rendent fous, ceux de Vlambeer en tête, Downwell joue une carte Roguelike qui participe au stress du joueur. Ces marchands troglodytes vendent de quoi reprendre de la vie ou augmenter les charges de son arme (voire les deux), à condition d’avoir assez de gemmes en stock. Mais le vrai casse-tête, c’est le choix imposé entre les 3 bonus de fin de niveau. Plus de vie ? Une arme plus puissante ? Des dilemmes classiques, mais toujours aussi efficaces… La découverte des nouvelles armes est du reste pleine de surprises. Certaines sont très puissantes, mais avec peu de munitions, ce qui a un impact direct sur la manœuvrabilité du personnage. Voyez les conseils d’Ojiro à ce sujet dans l’interview.

Downwell - Vendor

Le vendeur n’aime pas trop les voleurs…

Le gameplay appelle vite à la prudence. Cherchez à tracer vers la sortie et vos 4 pauvres points de vie de départ vont disparaitre en quelques secondes. Posez-vous, souvent, explosez tous les rocs et créatures pour rafler un maximum de gemmes pour pouvoir dévaliser les magasins. Chassez les upgrades de charges, de vie, les armes plus puissantes. Et rappelez-vous : tout ce qui n’est pas rouge et piquant peut aussi mourir d’un saut sur la tête. Et parfois uniquement comme ça ! Les tortues du premier niveau vont vous l’apprendre très vite.

Doigts de fée

Avec ses niveaux procéduraux, Downwell vous assure de ne jamais refaire le même parcours. Lancez une partie en étant un peu fatigué et vous allez très vite le regretter. Comme tous les titres du genre, il vaut mieux être au top de sa forme pour espérer faire un score honorable. Parfaitement jouable sur iOS grâce à des contrôles très simples, je vous préviens tout de suite : un iPhone 6 me parait le minimum pour jouer confortablement et bien voir les ennemis / obstacles. La bonne nouvelle c’est que ce jeu tourne aussi sur iPad. Là, c’est parfait ! On voit très bien pourquoi on vient de mourir et l’iPad vole parfaitement à l’horizontale vers le mur le plus proche. En revanche, ça fait cher le shuriken tactile…

Chiptune pas cheap

Grâce à Devolver, Ojiro a bénéficié des talents d’Eirik Suhrke (Spelunky) pour les musiques (qu’il vend plus cher que le jeu…) et de Joonas Turner (Broforce, Nuclear Throne…) pour les bruitages. Associés à l’animation sans faille de Downwell, le tout donne à l’action un côté trépidant tout simplement parfait.

Je voulais éviter une conclusion écrite par Captain Obvious, mais après tant d’éloges, il faut le rappeler : Downwell n’est pas pour tout le monde. Si votre truc c’est le tour par tour et la réflexion, passez votre chemin. Il faut des réflexes, aimer le challenge, supporter de relancer une partie de zéro toutes les 20 secondes – en tout cas au début. Bref, il faut un petit côté masochiste et du talent pour apprécier le bijou d’Ojiro Fumoto à sa juste valeur. Mais si vous avez le moindre doute, sortez ces trois euros, donnez les moyens à Ojiro de continuer sur sa lancée ! Vous pourrez toujours partager votre souffrance dans les commentaires. Je me sentirais moins seul. Un Game Over juste après avoir débloqué le bonus de lévitation vous donne un regard nouveau sur le sens de la vie. Croyez-moi.

Développeur : Moppin (Ojiro Fumoto)
Editeur : Devolver Digital
Format(s): iOS, PC (Steam), Android (début novembre)
Date de sortie : 15 octobre 2015


Interview – Ojiro Fumoto

Downwell - Moppin

Ojiro Fumoto, aka Moppin

(Certaines informations ont été utilisées directement dans le texte ci-dessus, toute impression de déjà-lu est normale ! )

Caféine : Bonjour Ojiro, merci de répondre à mes questions. La première est super simple : tu préfères être appelé Ojiro ou Moppin ? Et pourquoi “Moppin” au fait ?

Ojiro Fumoto : Les deux me vont ! Moppin est le surnom que m’avait donné un ami. Il n’y a jamais eu aucune signification derrière !

Downwell sort avec l’aide de Devolver Digital : quelle a été leur implication et comment en es-tu arrivé à travailler avec eux ?

Au tout début du développement, je tweetais souvent des vidéos des balbutiements du jeu. Et à force de retweets et RT de retweets, ils ont terminé dans la timeline du compte de Devolver Digital. Quelqu’un chez eux les a remarqués et m’a contacté pour me demander plus d’infos sur mon jeu. Les choses se sont enchainées naturellement à partir de là.

Quel est ton parcours professionnel ? Tu as un boulot à côté ou tu bosses à plein temps sur le jeu ?

J’étais juste étudiant (Tokyo University of the Arts) avant que Devolver me remarque. Depuis j’ai laissé tomber et je travaille à plein temps sur Downwell et ses différentes versions.

NdCaf : Ce qu’il oublie de dire, c’est qu’il étudiait le chant lyric et l’opéra… Une première chez un futur développeur de jeu non ? J’ai également appris qu’en 2014, Ojiro a dû convaincre ses parents de le laisser abandonner ses études. Il a argué qu’il s’en sortirait quoi qu’il arrive, en se faisant embaucher par une plus grosse société si besoin, grâce au prototype de son jeu. Pour la petite histoire, il a commencé à développer sur GameMaker Studio seulement en mars 2014 ! Et sa “nouvelle carrière” lui a couté sa petite amie au passage…

Downwell, c’est un projet solo ou tu travailles avec une équipe ?

Non, ce n’est pas vraiment un projet solo. J’ai eu l’aide de Eirik Suhrke qui a travaillé sur les musiques pour le jeu, ainsi que celle de Joonas Turner qui s’est occupé des bruitages. Les deux ont également bossé sur la conception sonore globale. Moi, j’ai fait tout le reste.

Pour quand est prévue la version Android ? Qui s’occupe du portage ?

Je pense sortir la version Android début novembre. Je m’occupe du portage moi-même.

Quelle est ton inspiration pour Downwell ?

Spelunky et Nuclear Throne pour le gameplay, et Cave Story pour la présentation du jeu. Pas mal de gens disent que ça leur rappelle des titres MSX ou NES, mais moi je n’ai commencé à jouer qu’à l’époque de la SNES !

NdCaf : Je confirme que Fask et moi avons pensé à H.E.R.O en voyant les premières images.

Combien de temps a pris le développement ? Et quelle a été la chose la plus difficile à réaliser ?

Ca m’a pris un an et trois mois pour terminer Downwell. Et le truc le plus compliqué fut certainement de trouver un gameplay qui fonctionne bien avec mon idée des Gunboots !

Des tips à donner pour les joueurs qui sont coincés ?

Vous devriez prendre toutes les armes sur votre passage ! N’évitez pas celles que vous n’aimez pas, car les ramasser augmente vos charges ou vos HP. Du coup, les éviter, c’est perdre des charges ou des points de vie, c’est stupide.

Un truc à ajouter, un coucou à passer à des amis ou des gens qui t’ont aidé ?

J’AIME VLAMBEER !!!

NdCaf : une explication s’impose. C’est la découverte de ce studio et de leur processus de développement “par l’échec” qui l’a convaincu de se lancer à son tour. Il a fait 12 prototypes de gameplay (qu’il qualifie de “pourris”) avant de tomber sur le concept de la chute infinie qu’il peaufinera jusqu’à en faire Downwell. Et Vine est là pour nous le prouver !








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