La saga Marvel Studios, 8ème partie : Iron Man 3, vers la Phase 2 et au-delà

Marvel Studios vient de clôturer sa Phase 1 de films avec brio et intègre la cour des grands à Hollywood, la tête haute. Les caisses sont pleines, le « momentum » est fort, l’heure est donc venue d’attaquer la Phase 2. Et pour ouvrir cette nouvelle salve de longs métrages super-héroïques, Marvel mise sur sa franchise phare : Iron Man. Un troisième opus sur fond de libertés prises avec les comics, des changements qui ne vont pas plaire à tout le monde…

Iron Man 3

Attention, disclaimer : si vous n’avez pas encore eu la chance de voir Iron Man 3, je vous invite à suspendre la lecture de ce papier immédiatement. Pour des raisons évidentes de clarté, je ne vais pas me priver de vous spoiler un élément important de l’intrigue. Si vous faites partie des gens qui abhorrent ce genre de choses, vous êtes prévenus…

Retour aux sources

Comme je le précisais dans l’intro, la Phase 1 des films du MCU vient de se terminer avec la sortie de The Avengers, carton plein au box office et dans le cœur des fans, apothéose d’une aventure entamée en 2008, avec la sortie du premier Iron Man. Pour ouvrir la Phase 2, Marvel choisit donc fort logiquement de resservir du Tony Stark en apéritif. Et ça a beau être un choix logique, ça n’en est pas moins une entreprise risquée, surtout après un épisode 2 un peu bancal.

D’ailleurs, Jon Favreau, le papa de la franchise, bien épuisé par ce tournage, a déjà annoncé depuis fin décembre 2010 qu’il raccrochait les gants. Dorénavant, l’acteur-réalisateur se contentera d’incarner le personnage de Happy devant la caméra, et d’encaisser aussi le chèque lié à son nouveau titre de producteur exécutif sur la franchise, parce que bon, il faut bien bouffer.

Immédiatement, Robert Downey Jr (dont on connaît désormais l’importance dans le processus de casting chez Marvel) suggère un nom qui lui est cher, celui de Shane Black. Scénariste aguerri, qui a popularisé le « cop movie » dans les années 80 avec Lethal Weapon, c’est aussi lui qui a relancé la carrière de Downey Jr et lui a permis de revenir sur le devant de la scène pile au moment où Marvel recrutait.

Eh oui, le vrai instigateur de la renaissance de ce bon RDJ, avant Marvel, c’est Black, qui lui a servi un rôle taillé sur mesure dans le fantastique Kiss Kiss Bang Bang. Juste retour d’ascenseur, donc. Marvel dit « banco ». Black est officiellement engagé à la réalisation et la nouvelle est accueillie dans la liesse par les fans des deux bords. S’il subsistait encore des inquiétudes liées au départ de Favreau, cette annonce les enterre une bonne fois pour toutes.

Scénarisé in Extremis

Iron Man - Extremis

L’arc Extremis de Warren Ellis, grosse source d’inspiration de ce troisième opus ciné.

Petit souci : le film est prévu pour mai 2013, on est début 2011 et il n’y a toujours pas de scénario. Un détail. Heureusement, Black est avant tout un scénariste, la réal’ c’est un truc plutôt récent pour lui. Du coup, il se propose de prêter sa plume et embauche pour l’épauler le britannique Drew Pearce, déjà responsable d’un traitement des Runaways pour le studio (projet toujours au placard à l’heure où j’écris ces lignes, snif). Les deux hommes se mettent immédiatement au boulot, il n’y a pas un instant à perdre.

La trame principale s’inspire en grande partie de l’arc Extremis des comics, un arc de 2005/2006 signé Warren Ellis. Mais comme souvent avec le MCU, on y incorpore de nouveaux éléments, et on change quelques menus détails. Depuis ses débuts, l’univers partagé de Marvel joue l’adaptation, plus que la transposition littérale. Et si le studio veut continuer à surprendre son public, il doit s’autoriser ce genre de latitude. Iron Man 3 va cependant pousser le concept très loin en transformant complètement l’un de ses « big bads » légendaires : le fameux Mandarin. Et je ne serais pas complet si je ne m’autorisais pas une courte parenthèse sur la « polémique ».

Dans les comics, voyez-vous, le Mandarin est un scientifique chinois qui, en bon génie mégalomaniaque, tente de conquérir le Monde, armé des « ten rings », dix bagues qui lui confèrent moult pouvoirs. C’est sans doute la Némésis la plus célèbre de Tony Stark, en tous cas un grand méchant pour lequel les fans ont une affection toute particulière. Les attentes sur sa version grand écran étaient donc énormes, surtout après l’annonce du nom de Ben Kingsley pour incarner le rôle.

Tancer le twist

"You will not see me coming", qu'il disait. Il parlait sans doute du twist.

« You will not see me coming », qu’il disait. Il parlait sans doute du twist.

Bon, si vous avez vu le film, vous savez que le Mandarin d’Iron Man 3 s’avérera finalement très différent. Gros plot twist, on découvre qu’il ne s’agit en fait que d’un vulgaire acteur, un peu benêt, engagé pour véhiculer avec prestance et menace un message terroriste sur les chaines de télé. Un choix audacieux que certains fans vivront comme une véritable trahison. Pourtant, pour d’autres (dont je fais partie), il s’agit surtout d’une actualisation bienvenue du personnage, loin de la magie et autres éléments mystiques des comics. Finalement, le Mandarin du film est avant tout un symbole, une manière bienvenue d’adapter le matériau source en y incorporant la notion très moderne de communication politique. Enfin, ça c’est mon avis. A ce jour, le débat fait encore rage et certains fans ne s’en sont toujours pas remis. Fin de la (longue) parenthèse. Retour à la pré-production du film.

Pendant que Black et Pearce finissent le scénario, pouffant probablement à l’idée de fans outrés par ce qu’ils préparent, le casting prend forme. Les rôles secondaires du deuxième épisode rempilent sans se faire prier (Paltrow et Cheadle les premiers), et après Kingsley, déjà un gros loot, deux nouveaux noms plutôt prestigieux viennent étoffer l’affiche : Guy Pearce et Rebecca Hall (qui remplacera au pied levé Jessica Chastain, bloquée par d’autres engagements, snif encore).

Black is back

La version MCU d'Iron Patriot, une autre grosse liberté prise avec les comics.

La version MCU d’Iron Patriot, une autre grosse liberté prise avec les comics.

Le tournage débute le 23 mai 2012 et l’objectif est simple : conclure la trilogie et l’arc de rédemption de Tony Stark avec un film centré essentiellement sur lui, plutôt que sur son alter ego métallique. Un troisième opus axé sur l’homme derrière l’armure, le philanthrope milliardaire, et surtout ses crises d’angoisse à l’issue des événements de New York (une jolie allégorie de son alcoolisme dans les comics, soit dit en passant). Un film qui repose donc beaucoup sur les épaules de Robert Downey Jr.

Trouvant sans doute la tâche trop aisée, ce clown va donc décider de se casser la jambe en plein milieu de la phase de production et écoper de six semaines d’arrêt. Ça ne fait évidemment pas beaucoup marrer Marvel Studios qui refuse pour autant de retarder le chantier.

Pour pallier ce désagrément, Black fait un pari un peu fou : plutôt que d’attendre le retour de l’acteur en se tournant les pouces, et risquer un dépassement de planning, il va tourner les scènes en cours avec… une doublure ! Et ensuite, grâce à la magie du dieu CGI, réintégrer le visage de l’acteur par dessus. Des broutilles. Mais c’est ça, ou prendre un retard considérable et risquer des couts supplémentaires. Au final, le choix de Black s’avèrera payant. Parce que je ne sais pas pour vous, mais moi, j’ai beau l’avoir revu plusieurs fois, je n’avais jamais grillé l’existence d’un tel subterfuge. Bien joué, Shane.

D’ailleurs, niveau VFX, ce Iron Man 3 ne fait pas dans la dentelle : pas moins de 2000 plans avec effets visuels, tranquille, pas de quoi rougir face au monstre Avengers. Le gros œuvre sera confié à la société néo-zélandaise Weta, fondée par Peter Jackson, et qu’on connait bien pour son taf sur la trilogie Lord of the Rings. Si vous voulez en savoir plus à ce sujet, je vous invite à aller lire le post mortem de CG Society, plutôt touffu et avec de jolies photos.

钢铁侠

Shane Black et Robert Downey Jr, après avoir reçu leur chèque pour Iron Man 3.

Shane Black et Robert Downey Jr, après avoir reçu leur chèque pour Iron Man 3.

Après un tournage sans encombre, excepté les soucis de gambette de Downey Jr, Black livre un premier cut de 3h15, finalement réduit à 130 minutes, ce qui en fera tout de même le film le plus long de la série. Pour la version réservée au marché chinois, Marvel ajoutera quelques scènes sans importance, principalement des plans bidons pour faire un peu de placement de produit local. En tous cas pas de quoi vous ruer sur cette version anecdotique, contrairement à ce que les aficionados d’Extended Cuts pourraient tenter de vous faire croire.

Iron Man 3 sera présenté en avant-première chez nous, au Grand Rex de Paris, le 14 avril 2013, avant de sortir dans les salles américaines le 5 mai suivant. Je ne fais pas durer le suspens plus longtemps : pour un budget initial de 200 millions de dollars, le film va générer pas moins d’1,2 milliards de rentrées à travers le monde, s’élevant au rang de deuxième plus gros succès de l’année et deuxième film le plus rentable du MCU, juste derrière l’indétrônable The Avengers. Voilà une Phase 2 qui démarre sur les chapeaux de roue. Marvel Studios est définitivement en train de devenir, peut-être pas le maître du monde, mais au moins le maître d’Hollywood.

Pourtant, ce nouveau succès s’accompagne également d’une grosse zone d’ombre. Iron Man 3 est en effet le dernier film pour lequel Downey Jr a officiellement signé, et avec Avengers: Age of Ultron déjà en chantier, ça signifie qu’une renégociation est inévitable. Or, on sait à quel point Ike Perlmutter, le big boss de Marvel Entertainement, rechigne à lâcher ses billets verts. Joss Whedon, qui signera la réalisation du film, a pourtant déjà prévenu : sans RDJ, pas de Tony Stark. Et sans Tony Stark, pas d’Age of Ultron. Les prochains mois risquent d’être tendus…

L’invasion commence

im3_8Avant de conclure cette partie sur le troisième opus Iron Man, je voulais vous glisser un petit mot sur les One-Shots, dont j’ai honteusement omis de vous parler jusqu’ici. Lancés en 2011, sur le DVD de Thor d’abord, puis sur les autres ensuite, ces court-métrages n’étaient au départ que des petites pastilles rigolotes, sans réelle incidence sur le reste du MCU. Le premier, The Consultant, présentait une discussion entre Coulson et Sitwell, les deux agents du SHIELD, débattant de l’intérêt d’envoyer Tony Stark torpiller une négociation avec Thunderbolt Ross. Le second, A Funny Thing Happened on the Way to Thor’s Hammer nous faisait découvrir le côté « baston » de l’agent Coulson, une fois encore dans un format très court de cinq minutes.

C’est à partir d’Item 47 que les choses ont commencé à devenir plus sérieuses. On est tout à coup passé à un format plus long (12 minutes), avec plus de moyens et une vraie histoire, en lieu et place de ce qui passait jusqu’ici surtout pour un long gag. Agent Carter a ensuite confirmé la tendance, explorant la facette cachée de Peggy Carter, passant du statut de love interest dans le premier film Captain America, à femme d’action dans un court vraiment réussi.

Enfin, plus récemment, All Hail The King, fut un gros clin d’œil aux fans déçus du « reveal » du Mandarin dans Iron Man 3, annonçant l’existence possible d’un vrai Mandarin, pas très content qu’on ait usurpé son identité de la sorte. Bref, des court-métrages à voir si vous êtes fans du MCU et que vous étiez passés à côté.

Si je vous en parle aujourd’hui, c’est parce que leur arrivée dans l’univers Marvel n’est pas anodine. Ils annoncent très vite une autre tendance du studio : celle d’aller explorer d’autres médias que le long métrage. Une nouvelle voie qui, après quelques tâtonnements, s’ouvrira enfin dès septembre 2013, avec l’arrivée dans la grille d’ABC d’une série Marvel créée par Joss Whedon, le papa des Avengers… Les Agents du SHIELD s’apprêtent à débarquer et vont connaitre des débuts difficiles… Mais ça, on en reparle la semaine prochaine.

En attendant, pourquoi ne pas lire ou relire les autres parties de cette grande saga ?


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