Agent Carter : pièce de résistance pour une résistante

Loin des récits sordides et sombres de certaines autres productions de chez Netflix, le ton girly, grand public et l’ambiance rétro de la série ont su séduire les téléspectateurs à travers le monde entier. N’ayant pourtant qu’une saison de huit épisodes à son actif, Agent Carter s’est néanmoins imposé comme un nouveau succès du Marvel Cinematic Universe. Si Peggy Carter n’est en aucun cas un personnage principal des comics Marvel, elle apparaît pourtant dans de nombreuses productions du MCU, allant des films de Captain America à Avengers : l’Ere d’Ultron, en passant par Ant-Man ! Avec la reprise de la série, il était grand temps de faire un petit focus sur ce personnage trop méconnu.

Agent Carter LogoMargaret “Peggy” Carter apparaît pour la première fois, de façon non identifiée et le visage caché dans l’obscurité, dans une aventure retraçant les exploits de Captain America durant la Deuxième Guerre mondiale contée dans Tales of Suspense #75. Il faudra attendre le numéro 77 pour voir son visage et patienter sept années de plus pour obtenir son nom dans Captain America #162. Tout ça sous la houlette de Stan Lee et Jack Kirby, comme souvent à l’époque.

Agent Carter - Comics JeunePeggy Carter est une idéaliste américaine qui s’enrôla dans la Résistance française avec pour seul but de combattre les forces nazies alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente. C’est dans notre beau pays qu’elle rencontra le drapeau humain qu’est Captain America et ils tombèrent amoureux. Malheureusement, les héros des comics Marvel sont faits pour souffrir et à la libération de Paris, une bombe vint mettre un terme à cette idylle dysfonctionnelle sur fond d’occupation allemande. Amnésique, elle fut hospitalisée durant des décennies jusqu’à ce qu’elle soit traitée par un adversaire de son ancien petit ami : le Docteur Faustus. Sauvée par Captain America qui était en hibernation et donc toujours jeune, elle reprend du poil de la bête et rejoint l’organisation de contre-espionnage du S.H.I.E.L.D. et aide même son ex à plusieurs reprises à combattre diverses menaces. Moment clé, elle donnera le premier baiser interethnique (en 1974) avec Gabe Jones, agent du S.H.I.E.L.D. et ancien Howling Commando (l’équipe de soldats menés par Nick Fury durant la Deuxième Guerre mondiale). Elle fit même partie du staff des Vengeurs avant de prendre sa retraite, puis succomba à une forme de démence avant de finalement passer l’arme à gauche.

Agent Carter - Comics OldIl est important de noter que l’Agent 13, Sharon Carter, actuelle petite amie de Captain America, était censée être la sœur de Peggy. Cependant, depuis sa publication dans les années soixante, le bon Captain n’a quasiment pas vieilli (normal pour un personnage de BD). Peggy et Sharon se virent réattribuer de nouveaux liens de parenté (tante et nièce) pour faire passer la pilule. Autre modification, cosmétique cette fois : passer les cheveux de Peggy en châtain pour la différencier de Sharon (elles étaient toutes les deux blondes), qui n’était ni plus ni moins qu’une version contemporaine du même personnage, avec un visage identique.

Des bulles gout celluloïd

Agent Carter - Movie

« Love me or I SHOOT! »

L’apparition du personnage au cinéma dans Captain America: First Avenger se fera avec pas mal de différences par rapport à la version papier. Campée par l’actrice américano-anglaise Hayley Atwell, que certains ont pu découvrir dans le reboot du Prisonnier en 2009, Peggy devient une officière britannique de l’organisation fictive Strategic Scientific Reserve (et n’a jamais fait partie de la Résistance française) et elle bosse sur un projet de création de super soldat avec… Howard Stark ! Le personnage est maintenant une fusion de son alter ego papier et de Cynthia Glass, qui apparut lors de la minisérie The Adventures of Captain America : Sentinel of Liberty (écrite par Fabian Nicieza et dessinée par Kevin Maguire), qui tenait également le poste d’assistante de Chester Phillips. Elle avait au passage exactement le même look qu’Atwell dans le film. La (très) grosse différence ? Cynthia était en fait un agent nazi, ce qui ne risque pas d’être le cas avec Peggy. Cette dernière se prend d’amitié pour le chétif Steve Rogers et tombe amoureuse de lui quelques années plus tard alors que ce dernier est devenu Captain America. Hélas, l’ancien maigrelet s’écrase avec son avion et plonge dans une hibernation de plusieurs décennies. Le monde entier le croit mort.

Cette version MCU est celle d’une femme qui en impose et qui est décrite par Atwell – en reprenant la description de Ginger Rogers qui fut définie ainsi par rapport à Fred Astaire – comme étant “capable de faire tout ce que fait Captain America, mais a l’envers… et en talons hauts !”. Peggy Carter est une femme de caractère qui s’impose avec professionnalisme dans un monde d’hommes, en plein milieu d’une guerre et le tout sans masque ni super-pouvoirs.

Le bonus qui change tout

Marvel Studios frappe un grand coup en produisant un one shot (mini-film intégré dans la continuité du MCU) figurant sur les bonus du DVD / Blu-Ray d’Iron Man 3 (ndCaf : Faskil vous reparlera bientôt de ces bonus !).

Agent Carter One ShotSe déroulant un an après la “mort” du Captain, l’Anglaise bosse dans les locaux new-yorkais du SSR sous la direction d’un directeur misogyne à souhait, qui la traite comme si elle avait l’utilité d’un presse-papier décoratif. Mais un soir, un coup de téléphone débouche sur une mission nécessitant l’intervention d’un agent de terrain. N’en pouvant plus d’être cantonnée à la paperasse, et faute de présence d’officier supérieur, elle décide de prendre les choses en main. Et c’est là que va se définir le personnage tel qu’on le connaît. Peggy Carter démontre qu’elle est une badass qui en met plein la tronche (à coups de poing, pied, flingue ou gadget) à quiconque se dressera en travers de sa route. Le tout en faisant preuve d’ingéniosité et avec une classe exceptionnelle dont Atwell a le secret. C’est simple, elle semble être née pour porter les coiffures et costumes de cette période et n’a rien à envier aux plus grandes stars des années quarante.

Le film se finit sur une sévère réprimande verbale de son patron phallocrate (qui lui fait comprendre qu’elle n’est qu’une greluche qui a été embauchée par pitié, parce qu’elle fricotait avec le défunt Captain America) interrompue par un appel d’Howard Stark, qui invite l’Agent Carter à aller fonder un certain S.H.I.E.L.D. avec lui.

Succès critique. Jusqu’ici, les One-Shots étaient anecdotiques, mais cette fois on explore en profondeur un personnage. Les mauvaises langues iront jusqu’à dire que le court métrage de quinze minutes d’Agent Carter est la seule raison valable d’acheter le Blu-Ray du troisième opus du milliardaire en armure. (ndCaf : je connais un Belge qui ne sera pas d’accord).

Agent of the Year

Agent Carter - Promo SérieMarvel Television et ABC Studios mettent sur pied une série télévisée pour la diffuser sur la chaine ABC et évitent l’étape du pilote grâce au succès incontesté du court métrage. Rappelons qu’ABC (American Broadcasting Company) appartient à la Walt Disney Company, tout comme Marvel.

Le coprésident et producteur de Marvel Studios, Louis d’Esposito, reprend du service en tant que réalisateur pour le premier épisode, comme il l’avait fait pour le one shot. Christopher Lennertz fait de même pour la musique (les deux avaient aussi bossé sur un précédent one shot : Item 47). Bien entendu, Hayley Atwell est de la partie après être apparue dans Captain America : The Winter Soldier, mais cette continuité est cimentée par la présence de Dominic Cooper, qui reprend le rôle d’Howard Stark qu’il avait déjà incarnée dans Captain America : First Avenger et dans le one shot d’Agent Carter.

À tout cela s’ajoute un personnage connu du lectorat de comics : Edwin Jarvis, majordome de Tony Stark et des Vengeurs. Dans le MCU, le personnage n’est pas présent hormis en hommage via l’intelligence artificielle qui, par la suite, fera partie intégrante du personnage Vision : J.A.R.V.I.S. (Just A Rather Very Intelligent System) et il était donc grand temps de l’intégrer de façon complète. Cette fois, il est le majordome du père du personnage interprété par Robert Downey Jr. Les différences sont assez notables : si Jarvis était un petit rondouillard chauve américain qui gère exclusivement le manoir des Vengeurs, l’acteur James D’Arcy campe un anglais d’1m91 qui assiste notre femme d’action dans ses aventures. Note amusante : Paul Bethany, qui prête sa voix à J.A.R.V.I.S., joua aux côtés de James D’Arcy dans Master and Commander : de l’Autre Côté du Monde.

La série de Peggy Carter prit le créneau horaire de Marvel’s Agents of S.H.I.E.L.D. durant le hiatus de cette dernière et fut un succès immédiat.

Agent Carter - SérieLa série reprend plus ou moins le concept du one-shot : notre agent féminin est frustrée de se retrouver à servir du café alors qu’elle est plus compétente dans tous les domaines que ses collègues masculins. C’est alors que le playboy millionnaire Howard Stark lui confie une mission secrète de la plus grande importance. Voici notre héroïne catapultée espionne, contre-espionne, détective et femme d’action. Le tout en maintenant l’illusion d’un train-train métro, boulot, dodo, sinon c’est la catastrophe assurée, bien entendu.

MCU oblige, la série est parsemée de références et de cross-overs : les origines de la Chambre Rouge (qui entraina la Veuve Noire), Leviathan qu’on retrouve dans Marvel’s Agents of S.H.I.E.L.D., Anton Vanko qui est le père du méchant interprété par Mickey Rourke dans Iron Man 2, Hugh Jones (le président de Roxxon, compagnie malfaisante des comics), l’apparition du scientifique nazi Arnim Zola, le retour de Dum-Dum Dugan et des Howling Commandos, la présence du super criminel Docteur Faustus dont le véritable nom est Fenhoff et même la firme d’avocats Goodman, Lieber, Kurtzman & Holliway est mentionnée. Cette dernière est l’employeur de She-Hulk (Miss Hulk en VF), et son nom est une référence aux piliers de Marvel Comics : Martin Goodman, Stan Lee (dont le véritable nom est Lieber), Jack Kirby (dont le véritable nom est Kurtzman) et Holden Holliway qui lui est fictif. Mais c’est le seul avocat ayant une interaction avec She-Hulk, comme par hasard…

La reine du caméo

Agent Carter - Ant-ManAvec ses apparitions supplémentaires dans Marvel’s Agents of S.H.I.E.L.D., Avengers : l’Ère d’Ultron et Ant-Man, le personnage de Peggy Carter est maintenant parfaitement intégré à l’univers cinématique de Marvel. La seconde saison qui a débuté le 19 janvier y incorpore le personnage de Madame Masque, ainsi que la présence de la Darkforce (dimension de l’univers comics de Marvel) rebaptisée “Zero Matter” pour les besoins de la série, et qui refera surface dans le film de Doctor Strange.

Petite gâterie pour les fans, la showrunner, Tara Butters, a révélé qu’un podcast reprenant le concept du feuilleton radiophonique odieusement sexiste (et donc décalé et drôle) Captain America Adventure Program était en préparation ! Une preuve de plus que Peggy fait un carton, et ce n’est pas près de s’arrêter.

 

Agent Carter S2

Mais. Quelle. Classe.


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