La saga Marvel Studios, 17ème partie : Captain America: Civil War, la guerre du trois

Coucou, me revoilou ! Après Ant-Man, j’avais dû me résoudre à mettre en pause ma grande saga Marvel Studios, par faute de nouveaux films estampillés MCU. Mais avec la sortie de Captain America: Civil War, il était temps de reprendre nos bonnes vieilles habitudes et de jeter un œil en coulisses aux secrets de production d’un ambitieux chantier de plus dans l’univers cinématique Marvel.

Captain America: Civil WarTout commence par un joli troll. Le 28 octobre 2014, Kevin Feige, le grand guru de Marvel Studios, convie la presse « entertainment » pour un event surprise au cinéma El Capitan d’Hollywood. Comme on est à quelques mois de la sortie du très attendu Avengers: Age Of Ultron, et que la première bande-annonce vient de sortir, on pense d’abord qu’il va s’agir d’une projection exclusive du long métrage de Joss Whedon.

Mais rapidement, la rumeur enfle : après avoir snobé la Comic-Con de San Diego, Marvel Studios pourrait annoncer les titres de ses prochains longs métrages. Un sentiment renforcé par une déclaration de Robert Downey Jr. qui précise que le « roster » de la Maison aux Idées sera bientôt rendu public.

Le jour J, dans une salle comble et survoltée, Feige fait son entrée sur la scène et lance ce qui deviendra l’une des conférences de presse les plus maîtrisées que j’ai jamais pu voir. Non, sans déconner, prenez 30 minutes et allez la visionner : c’est construit comme un film, avec une montée en puissance, des twists et même des caméos. Allez, comme je suis gentil, je vous la glisse ci-dessous.

Fourbe comme un serpent

Civil War (film)

« To the Batmobile ! » Euh, wait…

D’entrée de jeu, Feige confirme ce que tout le monde savait déjà : il est là pour parler de la Phase 3 des films maison. Et il ouvre par une annonce surprenante, celle du sous-titre du troisième film Captain America : Serpent Society. La salle a beau applaudir ce premier reveal avec enthousiasme, on sent bien que tout le monde est tout de même un petit peu… surpris.

Il faudra attendre la fin de la conférence, et la projection d’un extrait exclusif d’Age Of Ultron montrant l’opposition grandissante entre Rogers et Stark, pour découvrir la supercherie. Après un petit numéro d’acting un peu forcé, Feige marmonne qu’il a désormais une meilleure idée de titre pour le film de Cap.

La salle est soudainement plongée dans l’obscurité et sur l’écran, un logo métallique apparaît, avec ces mots : Civil. War. Tsunami dans l’assemblée. La hype peut commencer. (Note : pour les curieux, le moment en question est à 21 minutes dans la vidéo ci-dessus).

On prend les mêmes…

Civil War (film)

Elizabeth Olsen (Scarlet Witch) qui masque difficilement sa déception face au biceps d’Anthony Russo.

Pourtant, très rapidement, la communauté de fans s’interroge : comment adapter à l’écran l’un des arcs les plus complexes des comics (à défaut d’être intéressant, avis perso), impliquant des dizaines de super-héros, dans un conflit aux multiples ramifications ?

C’est la lourde tâche qui va incomber à la paire Christopher Markus et Stephen McFeely, vétérans de la franchise Cap’ puisqu’ils ont bossé sur les deux films précédents. Les deux scénaristes se mettent à la tâche dès la fin 2013, alors que The Winter Soldier n’a pas encore pointé le bout du nez dans les salles (il ne sortira qu’en mars 2014).

Très réactifs, les gars de Marvel lâchent des bribes d’infos dans la presse en réponse aux questionnements des fans : non, Civil War ne sera pas une retranscription fidèle des comics. Il s’agira surtout de mettre l’emphase sur la dissension qui va naître au sein des super-héros, symbolisée par l’affrontement fraternel entre Stark et Rogers.

Et pendant que ça bosse d’arrache-plume sur le scénario, le reste de la machine Marvel Studios est déjà bien lancée. Les frères Russo, Joe et Anthony, qui ont signé le deuxième volet des aventures du Super Soldat, rempilent dès le mois de mars 2014 pour ce troisième chapitre, au grand soulagement des fans.

C’est que les deux petits gars, venus du monde de la sitcom télé, ont désormais leur horde d’admirateurs, une récompense amplement méritée vu la qualité du boulot abattu sur le précédent opus. Bref, on retrouve aux commandes de ce Civil War toute la team responsable du très bon The Winter Soldier, tout s’annonce donc sous les meilleurs auspices. Et pourtant, le projet a failli ne jamais voir le jour.

Money money money

Civil War Marvel (LOL)

Retirez-moi Photoshop.

Ah, la thune ! Cette source de tous les maux. L’avarice légendaire d’Ike Perlmutter, le big boss de Marvel Entertainment, donne à Kevin Feige de plus en plus de raisons de s’arracher les cheveux. Un conflit qui n’a de cesse de croître depuis 2005 et qui, à l’aube de ce nouveau chantier, va amorcer une véritable guerre civile dans les couloirs du géant des comics.

Car pour réussir à monter le projet, Feige va avoir grave besoin de RDJ. Sans Iron Man, pas de film. Et pour choper l’homme de métal, pas de mystère : il faut des sous. Beaucoup. Fidèle à sa réputation, Perlmutter rechigne pourtant à sortir le carnet de chèques, avant de céder à contre-cœur. Agacé par l’absence de vision de son supérieur, Feige claque la porte. Générique. CIVIL WAR.

C’est cette ultime dispute entre les deux hommes qui va donner lieu à une réorganisation administrative sans précédent au sein de la société. Marvel Studios rejoint le conglomérat The Walt Disney Studios (qui englobe notamment Pixar et Lucasfilm), s’affranchissant par la même occasion de la tutelle de la maison-mère historique Marvel Entertainement et du grippe-sou Ike.

C’est le début d’un schisme grandissant entre les divisions ciné et télé de Marvel (la branche Marvel Television restant pour sa part sous la tutelle de Perlmutter), scission qui aura d’importantes répercussions sur le MCU global et son homogénéité. Si vous voulez en savoir plus sur ce point particulier, je vous invite à aller écouter l’épisode spécial des Clairvoyants que nous avions consacré au sujet.

Mais revenons au film…

Spideyyyyy !

Civil War (Spidey)

« Hey everyone! »

Avec le quatuor des frères Russo et du tandem Markus/McFeely aux commandes (je vais les appeler RRMM, ce sera plus simple), la production de ce Civil War s’amorce dans l’allégresse générale. Tout le monde est confiant, le film devrait être bon, même si on ne peut s’empêcher d’être un peu inquiet quand tombe l’annonce d’un casting plutôt conséquent

Outre le valeureux Captain et sa Némésis du jour, Tony Stark, Marvel annonce également avoir recruté… l’intégralité des Avengers, hormis Thor et Hulk (qui a priori feront équipe au même moment dans Thor: Ragnarok, une romance improbable qu’on découvrira en novembre 2017). Comment ne pas redouter dès lors que ces personnages ne reçoivent pas tous la même attention et finissent en vulgaire fan-service ?

Challenge encore augmenté par l’arrivée de deux nouveaux protagonistes, et pas des moindres : le roi T’Chala du Wakanda, alias Black Panther (qui aura son propre film solo en 2018) et le très attendu Peter Parker, alias Spider-Man (qui aura lui aussi l’honneur d’une nouvelle franchise au ciné l’année prochaine).

D’ailleurs, petite parenthèse : l’arrivée de Spidey dans le MCU découle de la signature d’un accord assez historique entre Marvel Studios et la division ciné de Sony. Un deal qui permet à Marvel d’utiliser le perso dans ses franchises et de superviser un reboot de ses aventures en solo. Les fans en rêvaient sans y croire depuis des années, c’est désormais une réalité : le tisseur arrive dans le MCU, et fera ses premières armes dans Civil War. Comme si le projet manquait de pression supplémentaire… (Si vous voulez en savoir plus sur les tenants et aboutissants de cet accord, je vous invite à écouter notre épisode spécial des Clairvoyants sur l’arrivée de l’homme-araignée dans le monde des Avengers).

Infinity War: Prologue

Civil War

Crossbones et Anthony Russo, en pleine séance de porte à porte pour faire la promo du film.

Civil War est un exercice important pour RRMM. Comme ce sont les quatre hommes qui vont devoir gérer le bordel que sera Avengers: Infinity War et sa liste de persos longue comme le bras, le film constitue un terrain idéal pour apprendre les rouages de la gestion d’un « ensemble cast » conséquent.

Après avoir rajouté Daniel Bruhl dans le package d’acteurs (pour incarner une itération inédite du Baron Zemo), les frangins attaquent le tournage, tout en gérant le délicat casting de Peter Parker en parallèle. Comme à chaque fois sur un projet Marvel, le scénario subit moult remaniements de dernière minute, parfois quelques secondes avant de crier « moteur ! ». Mais globalement, on sent le quatuor rôdé et malgré le grand nombre de lieux de tournages éparpillés aux quatre coins du globe (Atlanta, Puerto Rico, l’Islande et l’Allemagne, notamment), rien ne viendra enrayer la mécanique.

De bonne augure pour Infinity War. D’autant que, sans rentrer dans une critique détaillée (ce n’est pas le but de ces dossiers), le film est une totale réussite, tant narrative que visuelle. Et avec autant de personnages avec lesquels jongler, ce n’était pas gagné. Civil War se paie en outre le luxe de proposer un « big bad » qu’on n’attendait pas vraiment, très attachant et aux motivations crédibles. Oui, le Zemo du film n’a rien à voir avec celui des comics, mais c’est sans doute l’un des antagonistes les plus réussis du MCU, avec Loki et Wilson Fisk.

Côté post-production, là aussi, c’est une affaire qui roule et Marvel repousse un peu plus à chaque film les limites de son expertise. Après un Hank Pym rajeuni plutôt réussi dans Ant-Man, c’est au tour de RDJ de prendre des années de moins grâce à la magie de VFX, et là aussi, carton plein. Rien à dire. Sans oublier Vision, les pouvoirs de Scarlet Witch, Giant-Man, et tous ces petits détails qui prouvent une fois encore qu’en 10 ans à peine, Marvel Studios a su s’imposer comme meneur de front dans le domaine des effets spéciaux sur grand écran, en faisant tourner à plein régime la R&D de dizaines de boites spécialisées.

Phase 3 : achievement unlocked

Civil War

Les frères Russo, les vrais super-héros du MCU.

Après un premier trailer diffusé en exclusivité chez Jimmy Kimmel le 25 novembre 2015, la machine marketing Marvel va se mettre en marche et faire gonfler un buzz qui n’en avait plus vraiment besoin. Au moment où j’écris ces lignes, le film n’est pas encore sorti aux États-Unis, mais a déjà récolté la bagatelle de 225 millions de dollars sur les marchés étrangers, en deux semaines à peine. Cela le place directement dans le sillage d’Age of Ultron qui avait terminé sa course autour du milliard et demi de dollars. Les analystes de Forbes prévoient 2 milliards. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.

Et maintenant que la Phase 3 est lancée, et plutôt bien lancée, c’est l’heure pour Marvel de reprendre des risques. Doctor Strange, qui sortira en novembre prochain, sera la première incursion du MCU dans l’univers du surnaturel et des mondes parallèles. Un pari risqué dans une franchise qui a jusqu’ici toujours pris garde de garder des bases scientifiques aux pouvoirs de ses héros, même ce bon vieux Thor. Mais ça, vous vous en doutez, ce sera pour la prochaine fois…

En attendant, pourquoi ne pas lire ou relire les autres parties de cette grande saga ?


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