La saga Marvel Studios, 20ème partie : Spider-Man: Homecoming, le retour au bercail

Seizième film (déjà !) de la juteuse franchise MCU lancée par Marvel Studios en 2008, Spider-Man: Homecoming a définitivement été un chantier à part. Annoncé en février 2015, après une longue période de rumeurs et négociations, ce deuxième reboot du célèbre tisseur a un peu surpris tout le monde. Il faut dire qu’après son absence remarquée des plans de la Phase 3, dévoilés par Feige et sa bande en octobre 2014 (alors qu’on murmurait le grand retour du héros), plus personne ne croyait vraiment en une nouvelle renaissance. Et pourtant…

Spider-Man: Homecoming

Personnage hautement populaire des comics Marvel depuis sa création en 1962 par l’incontournable tandem composé de Stan Lee et Steve Ditko, Spider-Man fut en 2002 la troisième franchise exploitée avec succès par Marvel Studios au cinéma (après Blade et les X-Men), à l’époque où l’équipe d’Avi Arad ne produisait pas encore ses propres films, mais tentait de rentabiliser ses héros en revendant leurs licences à d’autres studios (comme on a pu le lire dans la toute première partie de cette saga).

La suite, tout le monde la connaît mais comme ce n’est pas vraiment lié au MCU, on ne va pas trop s’y attarder pour l’heure. Rappelons juste pour les distraits qu’entre 2002 et 2014, Sony sortira cinq long-métrages autour du personnage (trois réalisés par Sam Raimi, deux signés Marc Webb), se payant au passage le luxe d’un reboot complet, nouvel acteur principal inclus, en 2012.

P.P. Phone Home

Spider-Man: Homecoming

Amy Pascal et Kevin Feige, manifestement ravis de pouvoir désormais afficher leur romance au grand jour.

Si les deux premiers opus de Raimi rencontreront un gros succès critique et populaire, participant à asseoir les bases d’une domination des comics au box-office, les longs-métrages suivant seront moins bien reçus. D’ailleurs, dès le reboot en 2012, Amy Pascal (l’une des pontes de Sony Pictures) sent bien que la franchise est en danger, et contacte secrètement Kevin Feige, pour lui demander conseil.

On sait aujourd’hui, suite au retentissant hacking de Sony en 2014, et la salve d’e-mails confidentiels qui ont ensuite fuité sur la toile, que cette relation particulière entre Pascal et Feige va se poursuivre bien au-delà d’une simple consultation, et s’avérera à l’origine du retour de Spidey chez Marvel Studios.

Après moult échanges sur les scénarios en chantier, échanges qui se solderont par de nombreuses ré-écritures des films, Pascal et Feige passent à la vitesse supérieure, et commencent dès 2014 à évoquer la possibilité d’une intégration du tisseur de toiles dans le très lucratif MCU.

L’idée est assez simple, et profite sur le papier à tout le monde : Marvel Studios prendrait en charge toute la partie production (scénario, réalisateur, acteurs, tournage, etc.), tandis que Sony conserverait le contrôle créatif, la gestion du marketing et les droits de distribution. En clair, comme le résumera Kevin Feige dans une interview de 2016 : « C’est une production Sony Pictures d’un film Marvel Studios. »

Après plusieurs mois de difficiles négociations dans l’ombre, Marvel Studios et Sony rendent conjointement la bonne nouvelle officielle le 9 février 2015 : Spider-Man rejoint le MCU ! Ou, plus précisément comme l’indique le communiqué, un « nouveau Spider-Man », qui fera son apparition dans un prochain film du Marvel Cinematic Universe, avant d’avoir droit à son long-métrage rien qu’à lui. Du coup, les interrogations fusent, accompagnés des premiers doutes : le public a-t-il réellement envie d’assister à un second reboot de la franchise en à peine quinze ans ? Va-t-on à nouveau avoir droit à un premier film solo nous narrant pour la troisième fois l’origin story du personnage, là où plus personne n’en ignore les détails ? L’Oncle Ben va-t-il une fois de plus mourir à l’écran ? Chez les fans, l’excitation fait place aux premières inquiétudes…

Peter Parker’s Day Off

Spider-Man: Homecoming

« On avait dit pas le physique, Tony. »

Pour calmer le jeu, Feige explique que ce nouveau Spider-Man ne passera plus par une énième narration de la genèse de ses pouvoirs. Le film y fera certes référence, mais Marvel et Sony considèrent que l’historique du personnage est désormais suffisamment connue de tous que pour ne pas avoir à tout ré-expliquer dans les détails.

Pour ce second reboot, la franchise va se recentrer sur le cœur du personnage : son adolescence, sa vie de collégien le jour, et de justicier masqué la nuit. Feige n’hésite pas à comparer leur projet aux films de John Hughes, que le président de Marvel Studios présente comme une de leurs inspirations majeures.

En mars 2015, un mois après cette retentissante annonce (tellement inattendue et inespérée qu’elle amènera le site IGN à ouvrir son article d’annonce par un « Yes, it’s true. » qui en dit long), on murmure déjà le nom d’un potentiel réalisateur et scénariste : Drew Goddard. Souvenez-vous : l’ex-membre de l’écurie Mutant Enemy de Joss Whedon, devenu showrunner sur la première saison de Daredevil pour Netflix. Un nom qui rassure, d’autant que l’homme n’est pas étranger au Spiderverse. Voilà en effet plusieurs mois qu’il oeuvre, pour Sony justement, sur un film articulé autour des Sinister Six, un célèbre groupe d’antagonistes de Spidey dans les comics.

Mais Goddard décline la proposition. Comme il l’expliquera lui-même en interview, après avoir travaillé un bon moment sur un projet spécifique, difficile de subitement changer d’état d’esprit pour attaquer quelque chose de sensiblement différent. Goddard refuse principalement parce qu’il déclare ne pas avoir d’idée de traitement particulier pour le personnage, mais on peut aussi supposer qu’il est surtout déçu que cet accord entre Marvel Studios et Sony risque tout simplement de condamner à l’oubli le scénario sur lequel il vient de passer plusieurs mois.

Holland, président !

Spider-Man: Homecoming

Tom Holland, Michael Keaton et Jon Watts débriefant une scène du film. Vous remarquerez le petit clin d’œil subtil au costume des comics dans l’accoutrement de Keaton.

Pour incarner ce jeune Peter Parker, pas question d’aller rechercher Tobey Maguire, ni même Andrew Garfield, il faut du sang neuf. En mai 2015, après avoir auditionné des dizaines de candidats, Marvel Studios et Sony arrêtent leur choix sur le jeune acteur britannique Tom Holland, déjà aperçu dans The Impossible.

Le garçon a, a priori, brillamment réussi les derniers exercices imposés par le studio, à savoir, donner la réplique à Robert Downey Jr. et Chris Evans, afin d’assurer d’une bonne alchimie entre les différents acteurs. Il est également parvenu à séduire les frères Russo, ce qui n’est pas à négliger car ce Spider-Man nouveau crû fera sa première apparition dans le troisième film de la trilogie Captain America : Civil War. Les frères réalisateurs ont donc eu également leur mot à dire dans le processus de casting. Ce qui leur a plu chez Holland ? Outre son âge, proche de celui de Parker, ses talents de gymnaste et de danseur, élément important pour incarner un héros tout en agilité et athlétique.

Quelque peu occultée par l’annonce du rôle de Parker, une autre information se glisse dans le communiqué officiel : c’est Jon Watts, réalisateur de faux documentaires pour le site parodique The Onion, mais aussi du long-métrage indépendant Cop Car, sorti en 2015, et qu’il a coécrit avec Christopher Ford, qui passera derrière la caméra. Pour le coup, vu la carrière somme toute modeste du monsieur, l’annonce fait peu d’effet et reproduit donc ce que l’on avait connu lors du choix de Scott Derrickson pour Doctor Strange, ou Peyton Reed sur Ant-Man. Marvel Studios a le nez fin pour dénicher les talents et on donc droit au bénéfice du doute.

Tony Stark Cinematic Universe

Spider-Man: Homecoming

Spider-Man: Titanic.

Maintenant que le film possède un acteur principal et un réalisateur, il est grand temps de se concentrer sur l’histoire. Pour travailler sur ce nouveau scénario « post-origin story », Marvel Studios fait d’abord appel à John Francis Daley et Jonathan Goldstein, qui viennent de se voir refuser le poste de réalisateur. Ils seront rejoints sur le tournage par Chris McKenna, Erik Sommers, Christopher Ford, et même Jon Watts, pour finaliser l’écriture de ce film très attendu au tournant.

L’intention de départ consiste à reprendre la trame là où Civil War s’est arrêté, et d’observer comment ce jeune Peter Parker de quinze ans va jongler entre sa vie d’étudiant dans un collège du Queens, et celle, nocturne, de superhéros. Inévitablement, et de manière finalement très organique, c’est au personnage de Tony Stark que Marvel Studios va confier le rôle de mentor. L’annonce de l’arrivée d’Iron Man au générique du film fera encore davantage trépigner les fans, même si certains, plus cyniques, y verront surtout un argument marketing. Il est vrai que, vu la popularité de l’acteur, c’est certainement un élément qui a dû motiver Sony et Marvel Studios à l’intégrer à l’intrigue. Mais pas uniquement…

Depuis le tout premier film, le personnage de Tony Stark est au centre du MCU. Il est le premier que Nick Fury vient voir au sujet des Avengers, son père a joué un rôle essentiel dans la création du supersoldat Steve Rogers, mais également du SHIELD, c’est à lui que l’on doit la création malheureuse du robot psychopathe Ultron et c’est encore lui qui se trouve à la source du conflit destructeur engendré par les Accords de Sokovie dans Civil War. En somme, depuis ces débuts, l’ensemble du MCU gravite d’une manière ou d’une autre autour du personnage de Stark. Il est donc parfaitement normal que ce soit à lui qu’incombe la tâche d’accueillir le nouveau héros dans sa franchise flambant neuve. Et si ça peut faire vendre des billets en plus, c’est encore mieux !

Cette arrivée dans le film de RDJ soulève la question des crossovers que l’on est en droit d’attendre entre le MCU et le Spiderverse. Selon Kevin Feige, rien n’est gravé dans le marbre : l’accord de collaboration entre les deux studios s’est fait, selon ses termes, « de bonne foi », sans préciser quels personnages avaient ou non le droit de passer d’une franchise à l’autre. « Cela nous permet d’avoir plus de jouets avec lesquels jouer au fur et à mesure que nous construisons ensemble une histoire », ajoutera-t-il pour appuyer le fait que tout est désormais possible.

Mais cette apparente flexibilité peut parfois également provoquer des « couacs » de communication, comme on a pu le voir récemment avec les annonces concernant les films Venom et Silver & Sable, utilisant des personnages appartenant au lore de l’homme-araignée. Ces films font-il partie du MCU ou pas ? À ce jour, les choses ne sont toujours pas claires : officiellement, ils existeront dans le même univers, mais sans interactions directes. De quoi ajouter encore à la confusion du grand public concernant les franchises de super-héros au cinéma…

Retour vers le Vulture

Spider-Man: Homecoming

Comme dirait Ned : « Badaaaaaaaass! »

En avril 2016, lors de la CinemaCon, Sony fait valoir son droit au marketing et annonce le titre officiel du film : Spider-Man Homecoming. Un titre malin qui fait à la fois référence à la tradition du même nom, très répandue dans les collèges américains afin d’accueillir les nouveaux arrivants, mais aussi au retour du fils prodigue de Marvel dans le giron de la maison mère.

Le même mois, on apprend que Michael Keaton (le premier Batman moderne sur grand écran) serait en négociation pour incarner le big bad du film, dont l’identité est alors encore tenue secrète. Après avoir dans un premier temps décliné pour cause d’agenda surchargé, l’acteur finit par trouver un terrain d’entente et accepte la proposition en mai. On apprend alors qu’il s’agira du Vulture (Adrian Toomes), le premier ennemi historique de Spider-Man dans les comics, doté dans cette version modernisée d’une technologie plus avancée que les longues ailes à plumes d’antan.

Et comme par hasard, on apprend aussi que cette itération du méchant puisera son origine dans un conflit avec… Tony Stark, qu’il voit comme responsable de tous ses maux. En somme, Vulture, en tous cas dans la vision de Jon Watts, représente avant tout un Stark qui aurait succombé au côté obscur, tout en partageant également un point commun avec Parker, celui d’être un « gars ordinaire » qui se retrouve tout à coup doté de « super pouvoirs » (conférés dans le cas de Toomes par de la technologie alien).

Et si le choix de Keaton fait l’unanimité auprès du public, il en va tout autrement en ce qui concerne la malheureuse Marisa Tomei, que l’on découvre à l’époque en tante May dans Civil War. « Trop jeune, trop sexy, rien à voir avec les comics » sont en résumé les réactions qui se font le plus entendre sur la toile. Ce à quoi Marvel Studios répondra : notre Peter est jeune, il n’y a pas de raisons pour que sa tante soit du quatrième âge. Une ligne de défense renforcée par cette citation du personnage lors de sa première rencontre avec Stark dans Civil War : « Nous existons en différentes tailles et formes. » Et toc !

Enfin un Avenger !

Après un tournage sans encombres, de juin à octobre 2016, qui verra l’équipe alterner entre Atlanta et Fayette County, une première bande-annonce sera diffusée en décembre 2016. Un gros succès marketing qui amènera Sony à annoncer très vite, et à la surprise générale, une date de sortie pour la suite du film : le 5 juillet 2019. On peut légitimement se demander s’il s’agit d’un excès d’optimisme, ou d’une réelle confiance dans le produit qu’ils s’apprêtent à livrer au public.

D’abord présenté en avant-première au Chinese Theater d’Hollywood le 28 juin dernier, le film sortira ensuite aux États-Unis le 5 juillet, soit une dizaine de jours avant d’arroser les salles par chez nous. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les premiers chiffres du box-office semble confirmer l’optimisme de Sony : à l’heure où j’écris ces lignes, Spider-Man: Homecoming est déjà « certifié fresh » sur le site Rotten Tomatoes, et côté sous, a déjà récolté près de 500 millions de dollars à travers le monde. Un très joli score ce qui le met au niveau d’un Guardians of the Galaxy vol. 2 dans les estimations globales.

Prochain projet sur le radar du côté de Marvel Studios, le troisième volet des aventures de Thor : Ragnarok. Un film qu’on annonce charnière dans cette Phase 3 et qui devrait jeter les bases du point culminant que sera Avengers: Infinity War. Mais ça, ce sera pour novembre prochain…

En attendant, pourquoi ne pas lire ou relire les autres parties de cette grande saga ?


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